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La licence SACEM n’est pas un SESAME

L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 14 décembre dernier (n°19/12865) opposait le célèbre auteur-compositeur américain Tom WAITS à la compagnie de théâtre THEATRE ESQESTRE ZINGARO et son fondateur BARTABAS.

BARTABAS ayant sonorisé son spectacle équestre intitulé « On achève bien les anges (Elégies) » avec les œuvres musicales et enregistrements de Tom WAITS sans l’accord de ce dernier, ce dernier a porté l’affaire en justice.

L’affaire soulève de multiples questions de propriété intellectuelle et notamment du droit d’auteur (tant son aspect patrimonial que son aspect moral) ; il nous a semblé important d’insister dans cette brève sur un seul aspect, à savoir la portée juridique de l’autorisation de la SACEM.

En effet, dans cette affaire, BARTABAS et sa société ont bien conclu des accords généraux avec la SACEM autorisant l’utilisation des œuvres de son répertoire dont les œuvres musicales de Tom WAITS (par le biais d’un accord avec la société américaine ASCAP).  Toutefois, selon Tom WAITS, ce seul fait ne saurait suffire pour rendre licite l’exploitation de ses œuvres musicales

En effet, la Cour rappelle que la SACEM n’est pas compétente pour délivrer des autorisations mettant en jeu l’adaptation d’une œuvre musicale ou sa synchronisation par incorporation dans le cadre d’une œuvre audiovisuelle. 

Elle rappelle que l’adaptation se définit comme un emprunt à une œuvre préexistante, qui se concrétise dans une œuvre seconde ayant une existence autonome ou qui s’incorpore dans une fusion avec celle-ci.

Ainsi, la question que devait trancher la Cour était la suivante : l’exploitation des œuvres musicales de Tom WAITS dans le cadre du spectacle de BARTABAS constituait-elle une simple exécution publique (auquel cas l’autorisation SACEM suffisait) ou bien une adaptation (auquel cas l’autorisation de l’ayant droit, c’est-à-dire Tom WAITS on son éditeur, aurait pu être nécessaire) ?

Sur la base d’une analyse factuelle approfondie, elle estime qu’il s’agissait bien d’une simple exécution publique :

« Si la partie musicale du spectacle « On achève bien les anges (Elégies) », spécialement les chansons de [Tom WAITS] a un rôle incontestablement majeur, conditionnant partiellement la façon dont les scènes, qui associent chevaux et humains dans une sorte de chorégraphie, sont perçues et interprétées par le spectateur, elle demeure parfaitement dissociable de l’aspect visuel et artistique du spectacle équestre dans lequel elle est incorporée.  Ainsi, les chansons revendiquées par les appelants demeurent… ».

Elle en tire la conclusion suivante :

« Il n’est donc pas démontré que l’utilisation faite par la société ZINGARO et BARTABAS des œuvres musicales de [TW] a excédé le droit d’exécution publique autorisée par les contrats généraux de représentation valablement conclus avec la SACEM.  Les atteintes invoquées aux droit patrimoniaux d’auteur de [TW] ne sont donc pas constituées, ni au titre de l’intégration dans une œuvre composite sans autorisation, ni au titre d’une adaptation non autorisée. »

En conclusion, il est important pour tout organisateur de spectacle de garder à l’esprit les limites de l’autorisation éventuellement obtenue des sociétés de gestion collective (et notamment la SACEM), laquelle peut, en fonction de l’exploitation envisagée, ne pas suffire afin de la rendre licite.

Asim SINGH

Avocat Associé – Propriété intellectuelle

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Arnaud Péricard avocat fondateur CPC & Associés

Arnaud Péricard

Fondateur, avocat associé

Avocat aux Barreaux de Paris inscrit depuis 1999
et de New-York depuis 2001

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